Le plus gros désavantage, lorsqu'on est patron, c'est qu'on est forcé de se coltiner la paperasse. Bon, j'aurais pu embaucher quelqu'un pour faire ça à ma place, mais honnêtement, étant donné que j'avais la formation pour, je n'allais pas payer quelqu'un en plus pour le faire ! ça peut me faire passer pour pingre, mais il y avait déjà pas mal de frais à couvrir sans que je ne m'en rajoute un de plus ! Il m'arrivait de bosser dans la salle, en buvant un café - il fallait au moins ça ! - comme ça, je voyais les gens aller et venir, et je gardais un oeil sur mes employés (mon côté tyran, sans doute, selon Elena). Et honnêtement, je n'ai jamais su m'approprier le bureau qui avait auparavant appartenu à mon père, donc, la salle principale était parfaite.

J'étais en train de passer en revue une dernière série de dépenses, histoire de préparer le terrain pour le rendez-vous obligatoire avec le comptable - un type mortellement ennuyeux, toujours à chercher la moindre minuscule semi-erreur dans une ligne, genre, un 5 mal formé... - qui était pour bientôt, lorsque j'aperçus une tête connue. Enfin, je connaissais la plupart des habitués, à force. Mais celle-ci était passée d'habituée à "vient erratiquement manger un bout ou boire un verre". Et comme le veut le vieil adage, tout devient subitement beaucoup plus intéressant que notre travail quand il faut vraiment le faire... Je me contentais de ranger les feuilles dans la chemise cartonnée où je les conservais. De toute façon, personne n'était assez con pour essayer de me piquer quelque chose. Je me levais de ma table pour me diriger vers Indila Montgagnant, dite "Frozen". Eh oui, une mutante. Encore. Toujours, surtout au Croco.

- Salut !

J'avais encore un peu de mal à me faire à l'idée qu'elle avait perdu la mémoire et donc, qu'elle m'avait oublié (non, Elena, je ne suis pas égocentrique !).

- Je te sers quelque chose ?

Elle avait l'air un peu moins perdue que la dernière fois.